L'Insomniaque

Lettre à la majorité silencieuse

Il y a des soirs, comme celui-ci, où je me demande jusqu’où les gens vont laisser aller les “grands de ce monde” avant de leur dire: “c’est assez, allez-vous en”.

L’endoctrinement dépasse pourtant sans cesse les limites qu’on croyait pour lui imaginer. En Ontario, par exemple, les élèves doivent maintenant chanter l’hymne national en classe, pour “favoriser le civisme”. Si j’étais un père Ontarien, j’exigerais que mes enfants soient exempts de cette mesure débile et je ferais tout pour que les autres parents fassent de même. Mais ici, au Québec, grâce à notre DIVIN projet de souveraineté, nous sommes bien sûr immunisés à de telles pratiques. Et s’il y avait un hymne national québécois à chanter à l’école, combien de parents fermeraient les yeux?
De toute façon, pourquoi faudrait-il s’entêter à voir nos débats à travers les lunettes du foutu débat national? Les Ontariens peuvent bien chanter l’hymne national polonais, on s’en balance! Ce qui importe, c’est que personne ne semble vouloir arrêter notre longue marche vers l’abrutissement complet.

On annonce qu’à Prague, lors des rencontres du Fonds Monétaire International et de la Banque Mondiale le 26 septembre, nous verrons le déploiement d’une véritable zone militarisée. Pas moins de 11000 policiers devraient être sur les lieux. Les habitants du secteur ont été invités à passer une semaine à la campagne, avec offre de compensation. Même les jeunes de moins de 15 ans devront présenter une carte d’identité pour entrer dans la zone. Ne devrions-nous pas nous sortir en liberté surveillée? Un tout petit peu? Quand nous rendrons-nous compte que nous ne sommes libres que de consommer, d’acheter des biens inutiles et de nous faire matraquer par la publicité? Quand nous rappellerons-nous que la rue est-elle une place publique où nous pouvons nous exprimer, et non uniquement le lieu de déplacement de voitures remplies de travailleurs blasés?

La semaine dernière, nous avons appris que quelques garderies ouvertes 24 heures sur 24 seront mises sur pied au Québec. Bien entendu, il est ici question de DEMANDE: “c’est ce que les gens veulent! Ils travaillent de nuit et ont besoin de quelqu’un pour s’occuper de leur enfant!”
Nous devons être l’un des seuls endroits au monde à forcer les enfants à dormir ailleurs que chez eux pour permettre à leurs parents de travailler. Et on nous parle de demande?! Si les gens demandent une telle horreur, c’est parce qu’il n’y a pas un putain d’employeur qui a la générosité d’offrir un horaire de jour aux mères monoparentale!
Mais, direz-vous, les garderies sont nécessaires pour les gens qui travaillent de nuit dans des lieux de première nécessité, comme les hôpitaux par exemple. N’ayez crainte, on y a pensé! C’est pourquoi il y aura une de ces superbes garderies au Casino de Montréal, un haut lieu de philanthropisme qui, pour bénéficier à un maximum de gens qui en ont fait la DEMANDE, est lui aussi ouvert 24 heures sur 24.

Ils détruisent nos systèmes de santé et d’éducation pour pouvoir donner des millions à Bombardier, et nous ne disons rien. Ils transforment les prisonniers en esclaves en leur imposant du travail de manufacture, et nous ne disons rien. Ils nous racontent les pires idioties sur du papier qui épuise tranquillement nos forêts, et nous ne disons rien. Ils sont prêts à anéantir des cultures entières pour vendre leur minable marchandise à la planète entière, et nous ne disons rien. Dirons-nous quelque chose lorsqu’ils vont sucer tout le sang de nos veines et nous le revendre génétiquement modifié?