Chez moi, nous n'avons plus la télé depuis un peu plus d'un an. La raison: nous ne l'écoutions pas vraiment et mes colocs et moi avons décidé de ne pas renouveler notre abonnement avec notre câblodistributeur. Quand aux infos, personne parmi nous ne les prenait à la télé. Une heure de nouvelles par jour, dont 10 minutes d'annonces et 10 minutes de publicité déguisée du genre "qu'est-ce qui se passe à Star Académie", c'est ni plus ni moins une perte de temps. Récemment, j'ai découvert le plaisir d'écouter les nouvelles télévisées. Je ne capte pourtant toujours aucune chaîne sur ma télé. C'est sur mon écran d'ordinateur que se matérialise l'émission quotidienne du journal télévisé de Democracy Now!.
Democracy Now! est une chaîne indépendante qui diffuse à partir de New York, depuis les studios de la chaîne radiophonique indépendante Pacifica. La chaîne diffuse autant sur les chaînes télévisuelles que radiophoniques, ainsi que sur le net. Il est très facile de relayer leurs ondes via l'internet pour les aider dans leur croisade journalistique. La chaîne n'accepte aucune subvention gouvernementale ou corporative, ceci afin de conserver son indépendance.
La journaliste Amy Goodman, qui est un peu au "coeur" du projet, possède un parcours exceptionnel. Dans les années 90, elle a voyagé plusieurs fois au Timor Oriental avec le reporter Allan Nairn afin de couvrir les événements entourant la répression des populations locales par les forces indonésiennes. En 1999, ils furent arrêtés par l'armée indonésienne et déportés après qu'Allan ait été menacé d'emprisonnement.
La formule de l'émission d'Amy Goodman est relativement simple. Au cours d'une émission d'une heure, "The War and Peace Report", elle présente les nouvelles du jour à travers des extraits de documentaires et des reportages "maison". Elle invite souvent des gens à venir s'exprimer sur place ou via le téléphone, souvent des gens que l'on a pas l'habitude de voir dans les mass média américains, comme un ex-marine qui dénonce les violations de la convention de Genève en Irak ou un producteur d'Al Jazeera venu s'exprimer sur la destruction des bureaux d'Al Jazeera à Kaboul, puis à Bagdad. De temps à autre, elle fait aussi des débats; par exemple, elle a invité dernièrement l'auteur d'un livre qui soutient une théorie de la conspiration dans les événements du 11 septembre à venir défendre son point de vue face à un politologue membre de la Political Research Associates.
La principale force de Democracy Now! tient au professionalisme de sa couverture des événements. Leur position idéologique est très à "gauche" et ils ne s'en cachent aucunement. Les intellectuels de droite y ont quelque fois la parole, mais il y a plus de chance d'y rencontrer Noam Chomsky ou Howard Zinn que Donald Rumsfeld ou Pat Buchanan.
Aucune publicité externe n'est diffusée au cours des courtes pauses de l'émission. Pendant ces pauses, on trouvera généralement des images du monde accompagnées de musique. À l'occasion, lors d'une des pauses, il y a un "spot" publicitaire qui indique aux gens d'aller voir le site web de Democracy Now!, toujours sur fond musical non-agressant.
Il m'est arrivé de penser que Democracy Now! reprenait un peu le jeu des médias de masse en ne montrant qu'une face de la médaille. Or, s'il est vrai qu'ils s'adressent clairement à un public "de gauche" et que parfois on a l'impression qu'ils servent une propagande bien réchauffée, en réalité leur couverture est assez honnête et objective. Amy Goodman n'interviewe pas que les "hot shots" de la gauche américaine, genre Michael Moore ou Noam Chomsky, elle interviewe aussi des soldats, des juristes, des profs, etc. qui n'ont pas nécessairement une position gauchiste.
Finalement, la seule chose que j'ai à redire sur l'émission de Goodman, c'est qu'à la fin de chaque émission, elle fait une "plogue" pour son livre (dont je tairai le titre, elle va en parler quand vous allez l'écouter). Cet aspect "marketing" est également présent sur le site web, où vous pouvez acheter les cassettes des émissions, mais aussi des t-shirts et des tasses. Mais au moins, tout ce qu'ils vendent sont des produits "maison", ce qui leur permet de conserver leur indépendance tout en diffusant de façon très large. Peut-être est-ce un mal nécessaire pour combler ce besoin criant d'une alternative aux médias de masse américains.