Changer l'humain

Soumis par tatien le vendredi, 6 février, 2004 - 01:01 Essai
Science et technologie

On ne cesse de le répéter: le siècle dans lequel nous venons d'entrer sera celui des biotechnologies. Et, par le fait même, celui de la bioéthique. Dans un monde ultra technologisé, où le mantra « c'est technologique donc c'est bien » est répété à s'en rompre le gosier par les choristes allègres de l'économie de marché, nous serons bientôt confrontés à une forte pression sociale ayant pour objectif ni plus ni moins que la modification de l'espèce humaine. Mais qu'y a-t-il de mal à cela, après tout?

Dès qu'il est question de biotechnologies, ce sont souvent des images d'effroi qui nous viennent à l'esprit. Des armées de clones aryens d'Hitler, écrasant le monde sous leurs millions de bottes[1], à la société capitaliste eugéniste décrite dans le film Gattaca, où un jeune homme incarné par Ethan Hawke tente tant bien que mal de devenir astronaute malgré ses désavantages génétiques, les biotechnologies semblent avoir acquis une réputation nocive dans notre imaginaire collectif.

Pourquoi les biotechnologies jouissent-elles d'une telle réputation par rapport à d'autres technologies? Qu'y a-t-il de mal, en soi, à améliorer l'espèce? Quelles craintes peut-on avoir par rapport à cela?

L'une des craintes majeures est le risque de détruire la diversité génique. Dans le nord de l'Afrique, un million de personnes sont atteintes d'une maladie génétique, la drépanocytose. Cette maladie cause une déformation des globules rouges qui résulte en une forme d'anémie. Par contre, le virus du paludisme (malaria), l'une des principales causes de décès dans la région, n'arrive pas à se fixer aux globules rouges déformés, ce qui rend ces gens naturellement immunisés à la maladie[2]. En éliminant certains gènes, aujourd'hui nuisibles, nous risquons peut-être de nous priver de gènes qui seront utiles dans le futur.

Mais en fait, il me semble qu'il y a peu de risques de détruire la diversité. Il se peut que certains gènes soient perdus en cours de route mais il parait sûr qu'ils ne disparaîtront pas et deviendront plutôt moins fréquents, tout simplement. Autrement dit, c'est la courbe de distribution des gènes qui risque de changer. Mais il se peut, en effet, que des gènes soient perdus lors de campagnes de « vaccination génétique ».

Mais est-ce tellement grave? Après tout, nous travaillons depuis longtemps avec la sélection artificielle et les animaux domestiques que nous avons aujourd'hui ont perdu une bonne partie de leur pool génétique originel : est-ce dramatique? Pour moi, cela sonne un peu comme si on trouvait vraiment déplorable qu'on ne croise plus de dinosaures dans les plaines de l'Alberta. On oublie également qu'on pourrait également introduire dans le pool génique des gènes utiles, adaptés aux besoins de survie de l'espèce humaine, aujourd'hui. Ou même, réintroduire certains gènes perdus au moment où leur besoin se fait à nouveau sentir.

Un autre risque serait de faire une « grosse erreur » en manipulant le génome, causant une forme « d'épidémie génétique » ou je ne sais trop quoi. Cet argument est relativement valable, mais pourquoi le génie génétique fait-il plus peur que d'autres technologies? Oui, il faut être prudent, cela va de soi. Tout comme on doit être prudent avec le nucléaire, les produits chimiques et, surtout, les armes.

Personnellement, je pense que l'opposition la plus valable aux biotechnologies est le risque de discrimination génique. Le problème de l'eugénisme est beaucoup plus grave que d'autres formes de discrimination (sexisme, racisme) car il se justifie d'un certain point de vue économique. En fait, ma crainte majeure vient du fait que le système capitaliste justifie déjà ce genre de discrimination. En effet, on sait bien que la couleur de la peau n'a pas d'influence sur le rendement d'un employé (le sexe peut en avoir un, selon le type de travail). Par contre, un handicap ou un avantage génétique peut avoir un impact sur le rendement. Il faudrait donc une société qui ne juge ni ne rémunère en fonction des avantages individuels ou qui soit capable de séparer ce qui est dû à des facteurs sur lesquels l'individu n'a aucun contrôle (génétiques et environnementaux) de ce qui est dû aux facteurs sur lesquels il a du contrôle. Peut-on vraiment penser qu'il soit possible de juger de cela?

Mais encore une fois, je reviens à l'idée que les biotechnologies ne sont pas outrement différentes de leurs compatriotes « non-bio » sur ce point. Dans notre société, les classes sociales et les opportunités sont beaucoup fonction du milieu (environnement) de naissance. La différence est-elle tellement grande entre le « droit du sang » (des gènes) et celui du « cash »? Autrement dit, pourquoi serait-il pire de discriminer sur la base de l'hérédité d'une personne que sur la base de ses capacités alors qu'on sait très bien que celles-ci sont directement fonction de son environnement?

Certes, on s'insurgera obligatoirement contre une certaine forme d'eugénisme, par exemple un employeur qui demande un test d'ADN à un candidat, comme dans Gattaca. Mais choisir un candidat en fonction de son efficacité à compléter une tâche quand ce dernier possède un gène le rendant meilleur dans cette tâche est-il donc si différent?

Peu importent les moyens techniques ou génétiques que possède quelqu'un, notre système a tendance à le payer en fonction de sa production. Pour le moment, ce sont les moyens techniques qui importent le plus : l'individu armé d'une machine qui fabrique une chaussure à la seconde sera mieux récompensé qu'un individu qui doit les coudre à la main. Avec la biotechnologie, génétique et technique se confondent et le problème reste entier : est-il juste de rémunérer de cette façon?

Nous sommes tous des cyborgs[3]. Pas dans le sens que nous sommes des êtres mi-animaux, mi-machines, mais bien parce que nous dépendons de la technologie pour vivre. Et nous sommes des cyborgs depuis tellement longtemps que cela a conditionné nos propres caractéristiques génétiques. Ces modifications involontaires ne sont pas moins le résultat d'un développement technologique. Que nous puissions, dans un avenir proche, arriver à modifier nos gènes de façon volontaire ne change rien à cela. Ce n'est qu'une technologie de plus et le problème n'est pas de décider si nous en voulons ou non.

Le problème est beaucoup plus complexe : il s'agit de trouver les moyens pour créer, pour l'avenir, une société juste et équitable. Une société où les avancées technologiques profitent d'abord aux plus désavantagés, dans le but d'offrir à tous, sur une base égalitaire, un niveau de vie supérieur.

Bref, il faut changer.

--
[1] Ou mieux : Hitler cloné par les Russes en 57 et aujourd'hui allié à Ben Laden
[2] Anémie à hématies falciformes (drépanocytose), Réseau Protéus
[3] Donna Haraway, "A Cyborg Manifesto: Science, Technology, and Socialist-Feminism in the Late Twentieth Century," dans Simians, Cyborgs and Women: The Reinvention of Nature (New York; Routledge, 1991), pp.149-181.

Harraway cyberféministe

by tatien on 8 juillet, 2004 - 13:16Score: 1

À lire : Science, Technologie et Cyberféminisme par Rossella Monetta.

Quelques commentaires à Tatien

by phil on 5 mars, 2004 - 15:45Score: 2

Wow! Beaucoup d'opinions divergentes mais toutes intéressantes! Je suis d'accord avec quelques parties de chacun des textes...

D'abord, l'article de Tatien. Je suis entièrement d'accord avec toi au niveau de regarder les conditions dans lesquelles les manipulations génétiques se font (une société inégalitaire) avant de porter un jugement sur la technologie en tant que tel. C'est l'approche que j'essaie d'avoir aussi par rapport aux technosciences en général.

Par contre, tu te demandes d'où viennent les inquiétudes des gens. Là-dessus, je suis d'accord avec Anarcat: il y a quelque chose d'absolument sans précédent dans le fait de pouvoir manipuler la vie de cette façon. Ce n'est pas une question de jouer aux chrétiens et de nier que l'humain intervient depuis longtemps sur la nature. Mais il y a quand même une différence majeure, quand on ne laisse pas le temps (le "darwinisme", d'une certaine manière) faire son oeuvre. Alors quand tu dis:

"Après tout, nous travaillons depuis longtemps avec la sélection artificielle et les animaux domestiques que nous avons aujourd'hui ont perdu une bonne partie de leur pool génétique originel : est-ce dramatique?",

je trouve que tu passes à côté de quelque chose.

Ensuite, il y a la question des "classes" vs. "castes":

"Mais encore une fois, je reviens à l'idée que les biotechnologies ne sont pas outrement différentes de leurs compatriotes « non-bio » sur ce point. Dans notre société, les classes sociales et les opportunités sont beaucoup fonction du milieu (environnement) de naissance. La différence est-elle tellement grande entre le « droit du sang » (des gènes) et celui du « cash »?"

Ça va peut-être vous surprendre, mais moi je trouve qu'il y a une grande différence. On peut beaucoup se plaindre des classes sociales, mais le droit du sang, c'est encore pire. Ça veut dire que peu importe tes capacités, tu es assigné à une partie de la société. C'est ce qui existait dans la société "d'Ancien-régime" française (pré-1789). Le nazisme, d'une certaine manière, est aussi le retour du "droit du sang". Tu peux dire que c'est du catastrophisme de revenir à cet exemple, moi je dis que c'est des conséquences logiques et prévisibles de cette façon de penser.

La grande force des classes sociales, de l'idéologie libérale, c'est de masquer une inégalité réelle derrière une égalité de droit. Mais au moins, avec les classes sociales, on peut changer de statut. On peut faire jouer cette contradiction-là de manière à faire changer les choses. On peut dire: si notre société est égale, pourquoi certains n'ont pas 3 repas par jour? On peut passer d'un milieu ouvrier à un milieu scolarisé. Je reconnais que les chances sont minces, mais au moins elles existent. Il y a un potentiel qui est un très grand acquis démocratique (à défaut de plus, bien sûr).

Pour finir, je ne peux que recommander à mon tour le manifeste de Donna Haraway, "A Cyborg Manifesto: Science, Technology, and Socialist-Feminism in the Late Twentieth Century," dans Simians, Cyborgs and Women: The Reinvention of Nature (New York; Routledge, 1991), pp.149-181." C'est un texte important qui remet bien des choses en place. On a tendance à avoir une représentation négative du "cyborg", mi-humain, mi-machine. Elle, pour sa part, saute là-dedans avec joie, même si c'est une socialiste: elle voit là un potentiel extraordinaire pour l'humanité. C'est vraiment intéressant. Après tout, si on n'était pas dans une société axée sur la productivité et l'exploitation, ces avancées seraient magnfiques! C'est ce qu'il faut voir...

Mais voilà, le problème c'est qu'on est dans cette société-là, et c'est ça qui rend la question si difficile à résoudre.

 

Re: Quelques commentaires à Tatien

by tatien on 6 mars, 2004 - 18:38Score: 1

Mais voilà, le problème c'est qu'on est dans cette société-là, et c'est ça qui rend la question si difficile à résoudre.

Oui, tout le problème est là et c'est ce que j'essaie de montrer dans mon article. En fait, je trouve que réfléchir sur cette question nous amène à nous poser cette question: qu'est-ce qu'une société juste? Parce qu'un des arguments de la société libérale, c'est que tu dois être libre d'utiliser tout ce dont la nature t'a doté pour rechercher le bonheur. En gros on dit: si tes gènes font de toi une personne en bonne forme physique, tu as entièrement le droit de profiter de cette chance pour augmenter ton bonheur. Tu peux la donner à d'autres, plus faibles que toi, mais c'est ta décision.

Mais là, si tu as été modifié génétiquement pour être en bonne forme physiquement, être en santé, ne pas avoir de prédispositions à telle ou telle maladie, etc., ce n'est plus la nature qui t'en a pouvu. Ce n'est plus un phénomène aléatoire, tout devient fonction de la richesse de tes parents et du cash qu'ils mettent pour te payer ces modifications. Donc l'argument ne tient plus dans ces conditions.

Re: Changer l'humain

by mazesoul on 3 mars, 2004 - 17:26Score: 1

Depuis toujours, l'être humain poursuit sa quête de l'inconnu. Que ce soit nouvelles terres ou nouveaux traitements, l'objectif reste le même, découvrir ce qui se cache de l'autre côté du miroir. À l'heure où cette connaissance se trouve à notre porte, la résistance persiste. Les modifications génétiques existent depuis toujours; qu'elles soient causées par un changement climatique important, une migrations ou l'éjection massive de polluants atmosphérique, la vie s'est toujours métamorphosé pour survivre.

Que l'être humain décide de s'attaquer à un mécanisme intrinsèque de la vie consciemment n'indique à mon avis que la simple continuité. La vie trouve toujours un chemin pour reprendre l'expression du chaoticien du Parc Jurassique. Nous n'avons jamais tout contrôllé et n'y arriveront peut-être jamais, mais est-ce une raison pour se priver de connaissances qui transformeront à jamais notre existence. Je ne le pense raiment pas. continuons plutôt notre quête comme de tout temps nous l'avons fait car c'est ce qui nous maintient en vie.

Les capacitées de la vie seront mises à rude épreuve mais en-a-t-il jamais été autrement? Les applications du génie génétique sont immenses, le voyage prolongé dans l'espace, l'accession à de nouvelles capacitées de notre organisme jusqu'alors insoupçonnées. Est-ce que l'emprise corporative doit nous empêcher d'accéder aux bénéfices de cette technologie? L'élitisme et les classses sociales sont des phénomènes dont ont peut difficillement se défaire à court-terme, doivent-ils pour autant prévenir ce qui pourait être une révolution majeure dans l'histoire de l'espèce et probablement de la vie.

Les questions d'éthique auront toujours leur place mais sont probablement beaucoup plus efficaces impliquées qu'en opposition. D'accord, il faut se méfier mais ça ne signifie pas qu'il faille tout rejeté en bloc. Un monde de possibilitées s'ouvre à nous, (encore) sachons en profiter.

Life is recursive

::mazesoul::

 

Quelques commentaires à Mazesoul

by phil on 5 mars, 2004 - 16:05Score: 2

"Depuis toujours, l'être humain poursuit sa quête de l'inconnu. Que ce soit nouvelles terres ou nouveaux traitements, l'objectif reste le même, découvrir ce qui se cache de l'autre côté du miroir. À l'heure où cette connaissance se trouve à notre porte, la résistance persiste."

Je ne suis pas d'accord avec ça. Pour moi, ça inclut les manipulations génétiques dans une sorte de "nature humaine" qui serait fondamentalement portée à découvrir, à faire des recherches scientifiques presque. Comme la plupart des arguments renvoyant à la nature humaine, ça ne se vérifie pas dans les faits.

En effet, même si toutes les sociétés ont cherché à expliquer l'inconnu (ex. la mort par la religion, l'origine de l'espèce, etc.), ce ne sont pas toutes les sociétés qui ont voulu pousser les découvertes toujours plus loin. Au contraire, c'est plutôt minoritaire dans l'histoire de l'humanité (disons... 500 ans sur des milliers d'années).

L'autre chose avec laquelle je suis en désaccord avec toi, c'est que tu sembles voir la science comme une simple "quête de connaissances". C'est la vision qu'on en a souvent, mais je crois que c'est l'idéologie qu'utilise la science pour se développer. La science n'existe pas seulement pour repousser les limites de l'inconnu, c'est aussi une technique de domination. Il est plus facile de contrôler la nature, de détruire des forêts, de polluer, etc. lorsqu'on a enlevé à la nature tout le caractère sacré que la religion lui donnait (je ne suis pas religieux en passant). Depuis ses origines, la science, malgré elle peut-être, a servi à la domination de l'humain sur la nature et à la domination de l'humain sur l'humain (ça, c'est le rôle des sciences humaines). Les manipulations génétiques ne sont qu'un pas de plus dans cette voie.

" Que l'être humain décide de s'attaquer à un mécanisme intrinsèque de la vie consciemment n'indique à mon avis que la simple continuité. La vie trouve toujours un chemin pour reprendre l'expression du chaoticien du Parc Jurassique. Nous n'avons jamais tout contrôllé et n'y arriveront peut-être jamais, mais est-ce une raison pour se priver de connaissances qui transformeront à jamais notre existence. Je ne le pense raiment pas. continuons plutôt notre quête comme de tout temps nous l'avons fait car c'est ce qui nous maintient en vie. "

Je trouve pour le moins frappant que tu prennes cet exemple du chaoticien de Jurassic Park, parce qu'il disait cela pour montrer que le clonage de dinosaures est de la folie pure. La volonté de contrôle et d'exploitation de la nature par le biais de la science (Le parc jurassique est un super bon exemple, même s'il est fictif: est-ce qu'on fait des découvertes pour le plaisir de la connaissance? non, c'est pour arranger la vie comme on veut pour en faire un parc d'attractions) mène aux pires catastrophes, et surtout pas au "maintien de la vie" !

Les manipulations génétiques dans une société inégalitaire, ce n'est pas seulement un "pire aller", c'est ouvrir la voie à un monde cauchemardesque. Les "comités d'éthique", impliquées mais non en opposition comme tu dis, ne sont dans ce contexte qu'une simple caution morale. Je suis d'accord avec toi, c'est révolutionnaire comme changement, ce qui nous attend. Je ne rejette pas en bloc cette technologie, je la rejette totalement dans le contexte de la société actuelle, c'est différent.

Re: Changer l'humain

by mathieu on 3 mars, 2004 - 15:36Score: 1

Je viens de "tomber" sur un article (en français) qui parle pas mal de la question des modifications génétiques pré-natales... : "Essayer d'empêcher les bébés OGM ? Autant pisser dans un violon !".

...Une analyse rapide du livre d'un auteur pro-modifications génétiques...

Juste avec le titre, l'idée de "on peut rien y faire" apparaît et ça m'agace beaucoup!

L'opposition

by anarcat on 23 février, 2004 - 09:12Score: 1

... c'est lui. Malheureusement, l'article n'est pas disponible en lignes pour les non-abonnés (quelle honte!), mais je vous donne quelques citations intéressantes:

Dans le dernier siècle, on a multiplié par deux l'espérance de vie moyenne des humains. En 2050, vivrons-nous jusqu'à 150 ans ? «Si oui, avec quelles conséquences sociales, morales ?», s'interroge Kass. Et les enfants, «nous ne les voyons plus comme des cadeaux, mais comme des produits de nos désirs. Par conséquent, de plus en plus de parents aux États-Unis choisissent le sexe de leur enfant. Et certains voudraient déterminer leur profil physique, ou intellectuel, leurs gènes. Le diagnostic préimplantatoire le leur permet».

Leon Kass insiste : «Avoir un corps sans âge, avoir l'esprit en paix, dénué de tensions, effectuer de meilleures performances physiques, avoir des enfants en parfaite santé : ces désirs sont parfaitement humains. Ils fondent bon nombre de motivations humaines qui, lorsqu'elles sont bien comprises, peuvent produire de grandes choses. Ce qui est nouveau, c'est que certaines technologies nous donneront le sentiment d'atteindre ces désirs facilement, sans efforts.» Et Kass reprend l'expression fondatrice des États-Unis, «''poursuite du bonheur'', qui prend ici un tout nouveau sens». Nous nous illusionnons, dit-il : «le bonheur, ce n'est pas l'absence de limites, d'obstacles à notre volonté». Et l'excellence non plus : «Je ne crois pas qu'il y aurait d'autres Shakespeare, Tolstoï, Homère, Einstein ou Bach s'il n'y avait plus dans notre vie une certaine forme de confrontation avec des limites qui inspirent de la grandeur, le désir de la grandeur et de la transcendance.»

Re: Changer l'humain

by anarcat on 18 février, 2004 - 12:39Score: 1

Le problème est justement là: il faut faire attention avec les armes, les produits chimiques, le nucléaire, et l'humain a la fâcheuse tendance à ne pas faire attention. Il se pète la gueule à coup de kalachnikov et d'hiroshimas.

Alors de se fier à la bonne foi de l'homme pour manipuler quelquechose d'encore plus intrisèque à l'espèce, je trouve ça dangereux, et je crois que c'est la principale raison des hésitations généralisées. Les exemples auquel sont comparés les manipulations génétiques sont toutes des technologies qui manipulent une matière externe, souvent "morte", inerte. La génétique s'attaque directement à la vie humaine.

En fait, je crois que le problème majeur est que déjà dans le milieu pharmaceutique, on pousse des médicaments pour lesquels on devrait faire des recherches pendant des décennies, alors que les tests sont véritablement fait pendant quelques années au plus. Alors que les modifications génétiques fait par la sélection naturelle ou "artificielle" se produise sur des centenaires, avec élimination des "erreurs" de façon progressive, les manipulations génétiques ont un effet immédiat sur la nature de l'espèce, et annuler ces modifications devient alors très difficile.

En fait, le problème est que l'on procède à des mutations sans passer par le processus "équilibrant": la sélection à long terme, qu'elle soit naturelle ou artificielle.

 

Éclaircissements

by tatien on 27 février, 2004 - 12:23Score: 1

En fait, ce que je voulais présenter dans mon article, c'est que je pense que la question des biotechnologies et en particulier, du changement de notre espèce, nous ramène directement à la question du choix d'un modèle de société équitable.

C'est la litanie libérale: "Tout le monde naît égal" qui en prend pour son rhume plus que jamais. Parce que ça ne tient tout simplement plus. Parce que si on peut acheter, pour ses enfants, un meilleur bagage génétique, c'est /clair/ que tout le monde ne naît /pas/ égal.

Mais en regardant de plus près, on se rend compte que ce n'est qu'une technologie de plus. Même sans cette technologie, on peut payer à ses enfants, si on en a les moyens, une meilleure éducation, de meilleurs soins de santé, une meilleure armée pour remplir sa tinke à gaz de pétrole, pour qu'il se déplace mieux. Y a-t-il une différence majeure entre ça et la modification génétique? Non! Enfin, je ne trouve pas. Alors si on est contre l'un, on devrait être contre l'autre aussi. On devrait être contre le fait que notre système fonctionne comme ça, on devrait changer notre façon de faire.

Bref, la technologie - et la biotechnologie - n'est pas le problème. Le problème, c'est encore et toujours notre système socio-économique.

 

Re: Éclaircissements

by chuck on 4 mars, 2004 - 15:19Score: 2

Moi je vais dans ton sens, ce qui conditionne le plus le développement de l'être humain c'est le capital des parents. D'ailleurs la phrase "Tout le monde naît égal" ne tient déjà plus dans la société actuelle. Toutes les études sur le développement de l'humain montrent que certains facteurs de risque sont déjà présents à la naissance de l'enfant, par exemple le fait que la mère ait consommé des substances (drogues,alcool,cigarettes) durant la grossesse ou le poids de l'enfant (directement relié à l'alimentation de la mère), le fait qu'il soit prématuré ou non. Tous ces facteurs de risques prédisent bien des indicateurs comme l'obtention d'un diplôme du DES (sans vouloir dire que tous ses enfants n'obtiendront pas leur DES). Il est très difficile d'intervenir, pour atténuer ses facteurs de risques.

Pour revenir aux avancés dans la génétique nous les surestimons peut-être ... En fait, il est possible à l'heure actuelle de clôner certains espèces animales et végétales mais il est impossible de dire avec précision pourquoi ça marche dans certains cas et ça ne marche pas dans d'autres. Il vaudrait donc mieux à mon avis continuer dans cette lancée et avoir un suivi sur cette nouvelle technologie, plutôt que de bannir le développement dans la génétique et le laisser à ceux qui ont les moyens de le faire dans l'ombre et sans l'avis du public. La génétique c'est un peu comme the game of life de Conway, c'est facile de modifier le patern de départ mais c'est presque imposible de déterminer ce qui va se passer par la suite car les possibilités sont infinies.